L’ami molette

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20/10/2013 par Thomas Fiera

Disons le tout net, Monsieur le Président, je suis définitivement fâché avec vous.

 

Ce n’est pas faute, pourtant de vous avoir défendu naguère, contre ceux qui vous surnommaient le Flanby dont on vous accusait d’avoir la consistance tenace quoique flageolante.

Mais non, disais-je. C’est un stratège. Un rusé. Un homme d’écoute.

Faut dire que ça nous changeait de l’autre bonsaï présidentiel qui à force d’avoir le nez à hauteur de caniveau raisonnait comme un roquet et confondait « tenir le haut du pavé » avec « être à ras le bitume ». C’est que ça aboyait tout le temps, cette sale petite bête, et ça mordait et ça pissait partout ! Une vraie carlamité !

Alors forcément, on voit débouler – enfin débouler, façon de parler… débouler au ralenti – le flegmatique, avec sa bonne tête d’héberlué chronique et sa voix de communiant qu’aurait oublié de muer, et on se dit bon… Pourquoi pas ? Un Président normal ? Admettons. Ça nous changera de la palanquée d’anormaux qu’on s’est farci depuis quelques décennies.

Enfin quoique… Normal… On avait un doute. Car même si c’était alors de l’histoire ancienne, il fallait quand même admettre que le bon gros père, là, avait connu bibliquement une nana complètement givrée portant un blaze fleurant bon le médicament d’avant-guerre et dont le moindre défaut était de se prendre pour un genre de Jeanne d’Arc SM.

On aurait du se méfier.

On s’est pas méfié.

On s’est installé, bien carré dans le fauteuil, le pop-corn sur les genoux, fébrile et impatient de voir à l’œuvre le président normal qu’allait mettre minable tout cette bande d’agnabeuhs réactionnaires et coincés du fion qui nous sert de droite parlementaire.

Après la troisième boîte de pop-corn on a commencé à penser que le film était un peu long à démarrer et que le réalisateur semblait avoir confondu « normal » avec « ennuyeux ». Et ce n’est pas l’escapade malienne qui nous fit réellement changer d’avis. Surtout quand on nous l’a resservie froide et sans sauce dans sa version syrienne.

Bref.

Déçu j’étais.

Irrité même.

Avec une pointe d’agacement.

Le genre d’agacement qui vous donne envie de foutre un grand coup de pompe dans le derche du balourd de la classe qui traîne en dernière position lors du footing hebdomadaire.

Quand je pense comment je m’étais fait chier à retrouver ma carte d’électeur ! C’est Bonnot, mon chat, un vieil anar atrabilaire mais clairvoyant qui l’avait planquée sous une commode. Elle en était ressortie poussiéreuse et grisâtre mais prête à servir et à envoyer à l’Elysée l’apôtre du changement.

Changement mon cul !

Image

Comme je suis du genre fataliste, je m’étais résigné à cette catatonie, à cette torpeur politique jusqu’aux prochaines élections. J’avais même remis ma carte sous la commode, c’est dire !

Fillon président ? Copé président ? Rien à foutre ! Au moins je pourrais critiquer le gouvernement sans avoir la honte d’avoir contribué à sa prise de pouvoir.

Mais là, franchement, on touche le fond.

Fallait-il ou ne fallait-il pas expulser la petite kosovar, sa famille et son gros con de père ? Affectivement je dirais non, rationnellement je dirais je n’en sais rien et politiquement je dirais, je m’en branle !

Mais la question n’est même plus là.

Ce qui me révulse, c’est qu’un homme supposé être un décideur.

Un homme qui a les destinées d’un pays entre les mains.

Un homme qui possède les codes pouvant déclencher le feu nucléaire.

Un homme.

Un adulte.

Un mec.

Décide de ne rien décider et abandonne à une gamine de 14 ans la liberté déchirante de choisir entre sa famille et son destin individuel.

La question elle-même est ignoble et stupide, car elle suppose que le destin d’un enfant soit dissociable de son histoire familiale.

Si l’ami molette avait eu la moindre dose de cojones il aurait choisi : la fermeté ou l’humanité.

Comme d’habitude, il a choisi : rien !

J’ai entendu dire que ce monsieur ne lisait jamais de roman. Cela ne m’étonne pas. Pour lire un roman, il faut une certaine capacité d’empathie dont il est manifestement dénué.

Nous eûmes un président boutiquier qui a dirigé la France comme une entreprise un peu louche.

Nous voilà avec un président rond de cuir, mollasson et veule, qui dirige la France comme le guichet poussiéreux d’une sous-préfecture de province.

 

On pourrait en rire, on pourrait en pleurer, si tout cela ne nous faisait pas courir le risque de nous réveiller un matin avec une présidente blonde au physique de baudroie.

 

On peut demander l’asile politique au Kosovo ?

 

6 réflexions sur “L’ami molette

  1. jpd83 dit :

    J’ai cru retrouver ce que je pense sur la question !!!
    en mieux écrit !

  2. CharlotteMaraud dit :

    Hum… Merci d’avoir suivit mon blog qui débute à peine, même si j’ignore s’il vous apportera grand chose… En attendant j’ai eu l’évidente curiosité de visiter votre blog, et voici où je tombe… Bel article, finement cynique et fermement posé… Après, votre personnage est peut-etre un peu too much, mais ça plait ou ne plait pas. En attendant, je pense suivre un peu vos articles… Bon travail, JB !

    • jbferrero dit :

      Merci. Le blog me sert un peu d’exutoire. Et si Thomas Fiera y est un peu too much, il est plus sensible et plus subtil dans les romans. C’est d’ailleurs cela qui m’intéresse : jouer sur les contrastes et les contradictions d’une personnalité tourmentée.

  3. pierreguidez dit :

    J’aime beaucoup votre ton. Le cynisme est un art de penser qui permet de verser dans le too much sans jamais y être vraiment. Je tente de m’y frotter dans mon blog, et je suis heureux d’avoir trouvé ici un univers similaire.

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